En intégrant des attributions judiciaires à la fonction de maire, le législateur vise certainement à renforcer son statut tout en lui donnant une légitimité supplémentaire afin de contribuer à l’échelle locale, au respect des lois de la république. ( Par Didier GOUNDEKE)
Aux termes de la loi n° 2018-975 du 27 Décembre 2018 portant Code de Procédure pénale, les maires ainsi que leurs adjoints ont qualité d’officier de police judiciaire au même titre que les procureurs de la République et leurs substituts, les juges d’instruction, les directeurs de police, les commissaires et officiers de police, les officiers et sous-officiers de gendarmerie et les commandants de brigade ou chefs de poste (Article 27). Cette qualité confère aux élus locaux un certain nombre de prérogatives spécifiques dans leur ressort territorial. Ils peuvent donc constater les infractions aux lois pénales commises sur le territoire communal, notamment les crimes, délits ou infractions, en particulier ceux portant atteinte à l’ordre public (ex. : troubles de voisinage, nuisances, dégradations…). Le maire peut recevoir les plaintes et dénonciations des administrés. En cas de flagrant délit, il peut interpeller, conserver les preuves et informer immédiatement le procureur. En sa qualité d’officier de police judiciaire, le maire de la commune peut requérir la force publique.
LIMITES ET OBLIGATIONS
Toutefois, le maire n’agit pas comme un policier. Il ne peut pas placer en garde à vue ni engager de poursuites judiciaires. Dans son rôle de relais judiciaire, la loi lui fait obligation de se référer au procureur en lui transmettant avec diligence les procès-verbaux qu’ils ont dressés ainsi que les objets saisis. Les procès-verbaux doivent énoncer la qualité d’officier de police judiciaire du rédacteur.
PAS D’IMMUNITE POUR LES MAIRES
Un maire ivoirien, comme tout OPJ, peut pleinement être entendu ou jugé, selon qu’il soit témoin, victime ou mis en cause. Sa qualité d’OPJ ne lui accorde ni immunité, ni privilège procédural. Cependant, lorsque ce dernier est susceptible d’être inculpé d’un crime ou d’un délit, commis dans la circons-cription où il est territorialement compétent, hors ou dans l’exercice de ses fonctions, le procureur de la République saisit le procureur général qui désigne, dans les huit (8) jours, la juridiction où l’affaire sera instruite et jugée, s’il estime qu’il y a lieu à poursuite ou s’il y a plainte avec constitution de partie civile. (Article 701). L’instruction et le jugement sont communs aux complices de la personne poursuivie même lorsqu’ils n’exerceraient point de fonction de police judiciaire.
SUSPENSION PAR LE PROCUREUR
Conformément à l’article 28 du Code de procédure pénale ivoirien, le Procureur de la République a le pouvoir de suspendre un Officier de Police Judiciaire (OPJ) – y compris les maires et leurs adjoints – dans l’exercice de leurs fonctions d’OPJ, en cas de manquements tels que les usages abusifs ou détournements des prérogatives d’OPJ ; les comportements contraires à la loi ou à l’éthique judiciaire ; les omissions ou manipulations de procès-verbaux ; les actes d’enquête biaisés, etc. La suspension initiale ne peut excéder deux (02) mois.