UN MAL SI NECESSAIRE !
Dans le cadre de leurs missions, les collectivités décentralisées sont amenées à réquisitionner des espaces publics ou privés nus ou même habités. Ceci se traduit par des expropriations et autres déguerpissements qui, au regard de leurs impacts économiques et sociaux, donnent lieu à des remous. Un véritable dilemme pour nos autorités locales qui doivent négocier entre efficacité et impopularité.
La décentralisation concède, par ailleurs, aux administrations locales (districts, mairies, etc.) les missions d’aménagement et d’organisation du territoire. Cette prérogative est consacrée par l’article 4 de la loi n° 2020-624 du 14 août 2020 portant Code de l’Urbanisme et du Domaine foncier urbain. Elle découle du devoir qui incombe à l’État et aux collectivités territoriales d’aménager le cadre de vie des populations sur le territoire national. La mise en œuvre de ces missions impose souvent aux administrations de recourir à des méthodes parfois brutales et contraignantes comme les déguerpissements et les expropriations.
1- LE DÉGUERPISSEMENT
L’autorité publique oblige des occupants d’une terre à l’évacuer, pour raison d’utilité publique ou de sécurité. Il intervient en cas d’occupationillégale d’un foncier contesté pour défaut de titre de propriété, ou d’un site inapproprié et présentant des risques pour les populations. Cette procédure se déroule en 6 étapes :
1- Déclaration d’Utilité Publique (DUP) du secteur à déguerpir.
2- Décision d’attribution du site pour l’infrastructure à installer ;
3- Recensement des personnes impactées par l’opération ;
4- Évaluation des bâtiments et terrains qui sont dans la zone en vue du calcul des dédommagements éventuels ;
5- Émission des préavis pour permettre aux occupants de quitter les lieux ;
6- Déguerpissement proprement dit par la destruction des bâtiments et ratissage des sites visés par l’opération.
2- L’EXPROPRIATION
• Expropriation pour cause d’utilité publique
L’expropriation pour cause d’utilité publique est la procédure par laquelle la puissance publique contraint toute personne physique ou morale à la cession forcée de son bien immobilier, moyennant une indemnisation juste et préalable déterminée par des experts. Seul l’État est compétent pour procéder à l’expropriation.
Les étapes :
1- Déclaration d’utilité publique
Elle est prise en conseil des ministres et désigne les propriétés concernées par l’expropriation. Le décret d’utilité publique doit être publié, sans délai, dans un journal d’annonces légales.
2- Enquête publique de commodo et incommoda
Elle permet d’informer les administrés et les futurs expropriés et à recueillir leurs avis.
3- Arrêté de cessibilité
Il permet d’identifier les immeubles dont l’expropriation est visée. Dès lors, les propriétaires sont tenus de produire leurs documents de propriété dans un délai de 2 mois. Toute personne concernée est tenue de se faire connaître dans le même délai.
4- Notification aux propriétaires concernés des montants des indemnités proposées.
5- Comparution des propriétaires devant la commission d’expropriation, en vue d’un accord amiable sur le montant des indemnités. Ceci doit se faire dans un délai de 03 mois.
6- Versement de l’indemnité convenue à l’exproprié au moment de la signature du protocole d’accord.
• Expropriation pour défaut de mise en valeur
Elle est prévue par la loi n° 71-340 du 12 juillet 1971. C’est une opération par laquelle des terrains urbains détenus en pleine propriété par une personne physique ou morale font l’objet d’un retour à l’Etat pour insuffisance ou défaut de mise en valeur constaté après cinq (5) ans de délivrance du titre de propriété. Cette décision peut intervenir en cas d’abandon du terrain ou d’insuffisance d’investissement au regard de l’emplacement du terrain ou de sa valeur. Elle est prononcée par arrêté du Ministre en charge de la Construction et de l’Urbanisme qui en a la prérogative exclusive. Les collectivités territoriales pourraient en prendre l’initiative, mais pas plus. En cas de désaccord, la phase judiciaire est enclenchée. La décision revient au tribunal territorialement compétent. Cette décision est exécutoire.